Quel avenir pour le télétravail ?

L’Institut Sapiens vient de publier une étude sur le télétravail, nouveau mode de travail généralisé depuis un an qui présente de nombreux avantages, à condition qu’il soit utilisé à bon escient. Le think-tank fait le bilan des aspects positifs, et émet des propositions pour améliorer les pratiques. Voici les grands enseignements de cette étude.

Un outil inclusif, qui fait office d’amortisseur économique

Le télétravail apporte une nouvelle relation entre le manager et le salarié, davantage basée sur la responsabilisation, l’autonomie et la confiance. Le salarié serait d’ailleurs plus efficace en télétravail, qui permet une réduction des perturbations ainsi que du temps de trajet transformé en temps de travail, une plus grande flexibilité, etc. Le travail par le résultat tend d’ailleurs à s’installer. Dans ce sens, la première proposition porte sur une revue de la législation sur les heures de travail : un télétravailleur doit pouvoir organiser sa journée en fonction du travail demandé et en fonction de certains impératifs privés.

Le travail à distance permet de plus de s’adapter à la situation du salarié : il peut aider les personnes handicapées, âgées, ou encore en congé parental, qui ne pourraient pas se déplacer sur les lieux de travail. Les propositions 2, 3 et 4 portent sur cette volonté d’utiliser le télétravail comme un outil pour ces catégories d’actifs.

Enfin, il permet d’assurer une continuité de l’activité économique, même sans se rendre physiquement en entreprise. Ainsi, alors que jusqu’à 25% des salariés se sont déclarés en télétravail, plus de 9 points de PIB ont été sauvés en 2020. La cinquième proposition souhaite la généralisation de plans de continuité d’activité incluant le télétravail comme voie de recours lors d’un événement exogène empêchant totalement ou partiellement l’activité.

Alors que seulement 27% des actifs seraient éligibles au télétravail, cette faculté ne devrait pas entrainer d’inégalités avec les postes non-télétravaillables. Des solutions doivent être trouvées pour avantager ces derniers. Parmi elles, celle énoncée en proposition 14 : faire prendre en charge à 100 % par l’employeur la prime de remboursement des frais de transport en commun dans les grandes villes, pour augmenter le pouvoir d’achat des salariés ne pouvant pas télétravailler.

Pour assurer une bonne pratique du télétravail, il faut également former les salariés et leurs managers, en développant comme attestation de participation à ces formations des certifications (proposition 15). Selon Christelle Duboy, responsable méthodes et qualités chez Askis, « La mise en place d’une certification spécifique aide le salarié à convaincre l’entreprise plus facilement, en donnant un poids institutionnel à sa négociation. Du côté des employeurs, la certification est également utile car elle rassure sur la capacité du salarié à rester performant à son domicile. »

Des mesures concrètes d’accompagnement

La mise en place pérenne du télétravail nécessite de mieux équiper les collaborateurs en outils informatiques domestiques, nécessaires à la continuité de l’activité (proposition 6). De manière plus générale, il faut aussi s’assurer de l’équipement des territoires, entre autres de l’accès au haut débit (proposition 10). De fait, sur l’accès à la connexion, une fracture s’opère entre les grands centres urbains et les zones rurales.

Il faut aussi apprendre aux salariés à sécuriser leurs données pour se défendre face aux cyber-attaques (vol de données et usurpation d’identité par exemple), qui augmentent de plus en plus. Les entreprises doivent prendre conscience du fait que cela touche tous les secteurs, et les propositions 7, 8 et 9 de cette étude portent sur un renforcement des systèmes de protection pour tous, en mutualisant notamment les dépenses et formations.

Toujours dans cet esprit d’accompagnement, les partenaires sociaux, alliés des salariés, doivent assurer la continuité de la relation en se saisissant notamment des outils numériques (comme le proposent les propositions 16 et 17).

Vers un exode urbain

Les confinements successifs entrainent de nombreuses prises de conscience chez les Français, et beaucoup souhaitent quitter les centres urbains pour investir les campagnes, retrouver des espaces plus grands, plus verts, et ainsi améliorer leur qualité de vie. Le taux de satisfaction du cadre de vie des personnes habitant en milieu rural ou péri-urbain est de 13 points supérieurs à celui des habitants d’une métropole.

Et le télétravail constitue une chance d’assouvir ce désir, notamment avec la multiplication des tiers-lieux et espaces de coworking, qui se créent au plus près des territoires. Le télétravail offre aussi de nouvelles opportunités d’emplois dans le sens où il donne aux entreprises l’accès à un bassin d’emploi plus large, mais aussi parce que des emplois en lien avec ces nouveaux actifs pourraient être créés (garde d’enfants, secrétariat, restauration…). Tout ceci permettrait de donner un second souffle économique à ces territoires, et d’agir pour l’environnement, en diminuant l’impact carbone des travailleurs grâce à la suppression de certains trajets domicile-travail. Les propositions 11, 12 et 13 suggèrent ainsi de favoriser l’installation des ménages dans les territoires, en développant notamment des espaces de coworking.

L’étude de l’Institut Sapiens conclut en disant : « Les grandes crises sont souvent le terreau de révolutions importantes ». La pandémie a permis de massifier le télétravail ; les actifs sont maintenant 55% à souhaiter que cette pratique se généralise, sans vouloir tomber dans le piège du 100% télétravail.

« Appliqué de manière régulière, le télétravail deviendra ainsi un outil au service du management, de l’inclusion sociale, de la productivité et de la transition écologique. »

Voir l’étude complète ici.

Lire l’article de Sophenn Le Roux sur le site de la fondation Travailler Autrement.