Quid de l’index d’égalité professionnelle ?

Publié le 1er mars 2021 par les entreprises, l’Index d’égalité professionnelle sert à faire avancer l’égalité professionnelle et salariale dans les entreprises, en les obligeant à publier des résultats satisfaisants, sous peine de sanctions. Mais en quoi consiste-t-il vraiment ? Et quels sont les enjeux derrière la nécessité d’un index ?

L’égalité professionnelle en France

Depuis plusieurs décennies, les gouvernements successifs se sont emparés du sujet de l’égalité entre les hommes et les femmes au travail. La première action en faveur a été la promulgation en 1972 de la loi relative à l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes, qui incitait les employeurs à rémunérer les hommes et les femmes de manière égale, à poste et âge équivalents. Puis en 2001, la loi Guénisson a obligé les entreprises à mesurer les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes, et a ainsi permis de développer plus largement le dialogue social sur l’égalité professionnelle.

Malgré ces dispositions, le chemin est encore long : les hommes toucheraient 22,8% de plus que les femmes selon les derniers chiffres de l’Observatoire des inégalités. Et à poste égal, les femmes gagnent 9% de moins que les hommes. La crise sanitaire a d’ailleurs aggravé la situation, puisqu’elle a stoppé les politiques RH et RSE en cours sur le sujet, dans les entreprises. De plus, selon Oxfam, même si globalement les femmes ont un niveau d’éducation plus élevé que les hommes, 55% des bas salaires les concernent.

Il apparaissait donc nécessaire et même urgent de créer un dispositif permettant de contraindre les entreprises à faire des avancées.

L’index d’égalité professionnelle

L’index d’égalité professionnelle a été mis en place avec la Loi Avenir du 5 septembre 2018. Chaque année, avant le 1er mars, les entreprises d’au moins 50 salariés doivent le calculer et le publier sur leur site internet, ainsi que le communiquer à leur Comité social et économique (CSE) et à l’inspection du travail. En l’absence de site internet, elles doivent le faire connaitre aux salariés grâce à d’autres moyens (email, affichage…).

L’index, calculé sous forme d’auto-évaluation de l’entreprise, se base sur 4 à 5 indicateurs, pour un total de 100 points maximum :

  • 1 : L’écart de rémunération femmes-hommes (noté sur 40 points) : calculé par tranche d’âge et par catégorie de postes équivalents
  • 2 : L’écart de répartition des augmentations individuelles (20 points)
  • 3 : L’écart de répartition des promotions (15 points, seulement pour entreprises de plus de 250 salariés)
  • 4 : Le nombre de salariées augmentées à leur retour de congé de maternité (15 points)
  • 5 : La parité parmi les 10 plus hautes rémunérations (10 points)

Si le résultat des cinq indicateurs additionnés est inférieur à 75 points sur 100, l’entreprise doit mettre en place des mesures pour atteindre ce chiffre en 3 années maximum. De même, si l’entreprise ne publie pas ses résultats de manière visible, ou si elle ne met pas en œuvre des mesures correctives (ou si celles-ci ne sont pas efficaces) au bout de 3 ans, elle s’expose à une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1% de sa masse salariale annuelle.

Les résultats pour l’année 2021

Le taux de répondants est passé de 59% en 2020 à 70% au 1er mars 2021, ce qui montre que l’Index est pris au sérieux. Mais si la note moyenne a augmenté d’un point en 2021 (85/100 par rapport à 84/100 en 2020), les entreprises ne sont que 2% à avoir obtenu la note maximale de 100/100. A l’inverse, 53 entreprises de 250 à 1000 salariés sont à moins de 75/100 pour la troisième fois, et s’exposent donc à des pénalités financières. Depuis 2019, le ministère du Travail et l’inspection du travail ont réalisé 17 500 interventions en entreprise, entraînant 300 mises en demeure et 11 pénalités financières. Mais l’indicateur qui regroupe les plus mauvais résultats est celui de la part des femmes dans les dix plus haute rémunérations de l’entreprise : dans une entreprise sur deux, il y a au moins 9 hommes dans les 10 plus hautes rémunérations. Cet indicateur est d’ailleurs en recul pour les entreprises de plus de 1000 salariés.

Comme l’a déclaré la ministre du Travail, « 98% des entreprises ont des marges de progrès ». Il faut continuer d’encourager les entreprises, même celles qui ont obtenu plus de 75/100.

Un index amené à évoluer

En janvier 2021, Terra Nova a publié une note intitulée « L’Index Egalité Professionnelle : Occasion manquée ou outil prometteur ? », qui reconnait le passage d’une obligation de moyens à une obligation de résultats avec une méthode commune imposée. Mais la note présente aussi les limites des indicateurs, comme le premier qui ne prendrait pas en compte les temps partiels (pourtant exercés majoritairement par les femmes) ou le quatrième qui ne fait que vérifier la mise en œuvre d’une obligation légale. La note énumère un certain nombre de recommandations pour améliorer l’index, comme celle d’instaurer un indicateur du pourcentage des femmes dans les bas salaires.

Dans le même sens, afin de rendre plus efficace l’index, une proposition de loi présentée par la députée Marie-Pierre Rixain et soutenue par l’exécutif, vient d’être annoncée. Elle prévoit notamment de rendre obligatoire la publication de tous les indicateurs constituant l’index d’égalité. Le président du Medef, Geoffrey Roux de Bézieux, a annoncé travailler avec le gouvernement sur un index pour améliorer la situation, notamment celle du manque de femmes dans les instances dirigeantes. L’index d’égalité professionnelle est donc bien amené à évoluer, dans un souci de recherche d’efficacité.

Par Sophenn Le Roux pour la Fondation Travailler autrement

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