Expliquer les faibles résultats de la VAE
Carole Tuchszirer est chercheure au Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET). Socio-économiste, elle consacre ses travaux à la formation professionnelle, au service public de l’emploi et au régime de protection sociale des chômeurs. Sur le blog du Cnam, elle pointe que :
les actifs salariés représentent 71 % des candidats à un parcours de VAE. Il s’agit principalement de personnes expérimentées qui ont entre 40 et 49 ans, pour 40 % d’entre eux. La part des demandeurs d’emploi est résiduelle : ils ne représentent que 29 % des candidats. Autre phénomène important : les femmes sont largement majoritaires, à 74 %. Les candidats prétendent aussi en général aux premiers niveaux de qualification : près des trois quarts d’entre eux visent l’obtention d’un diplôme de niveau V (CAP, BEP) au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ou un équivalent au bac. Beaucoup de ces titres correspondent aux métiers du social et du sanitaire.
Pour elle, la motivation principale des candidats est la recherche d’une reconnaissance. Souvent le projet professionnel qui suit la VAE n’est pas toujours mûri.
Interrogée sur le peu de candidats à la VAE et ses faibles résultats, la chercheure témoigne d’une convergence de difficultés, notamment la complexité des démarches administratives et les coûts importants que représentaient la VAE. Ainsi :
Tout actif peut s’engager dans un parcours VAE, mais ce dernier est coûteux en temps et d’une grande complexité administrative. C’est la raison pour laquelle une grande partie des candidats ne termine pas le processus. Ainsi, à chaque étape, entre la recherche du diplôme sur le Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) correspondant à son expérience, et la présentation devant le jury, le nombre de candidats diminue. […] Ce fait est d’autant plus aigu pour ceux parmi les demandeurs d’emploi qui ont perdu le lien avec le marché du travail. On note cependant que les abandons diminuent singulièrement lorsque les candidats sont intégrés dans une démarche collective.
Globalement, le nombre des candidats est en perte de vitesse ces dernières années.
Ce dispositif a en outre suscité des prises de positions idéologiques très fortes. Le milieu de l’Éducation nationale s’est montré réticent à s’engager dans ce processus. À ses yeux, le savoir expérientiel ne pouvait pas relever du diplôme. […] Encore aujourd’hui, le rapport entre valorisation des acquis de l’expérience et formation continue ou initiale est compliqué. Pour prendre un autre exemple, dans le milieu universitaire, l’idée que l’on puisse valider un doctorat en VAE, et donc que ce dispositif puisse toucher les plus hauts niveaux de formation fait débat.